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Sacré Cardinal !

vendredi 16 avril 2010, par Abbé Philippe Laguérie

« Nombre de psychologues, de psychiatres ont démontré qu’il n’y avait pas de relation entre célibat et pédophilie, mais beaucoup d’autres ont démontré, et m’ont dit récemment, qu’il y avait une relation entre homosexualité et pédophilie »

Voilà la désormais célèbre phrase du Cardinal Bertone, rien moins que le numéro deux de l’Eglise Catholique, comme Secrétaire d’Etat, qui fait scandale depuis, un peu partout, au point que le Père Lombardi, porte parole du Vatican a dû la nuancer comme suit : « Les Autorités du Vatican ne jugent pas de leur compétence de faire des affirmations générales de caractère spécifiquement psychologique ou médical, lesquelles relèvent naturellement des études de spécialistes et des recherches en cours ».

Ce qui n’est en rien un désaveu, comme les journalistes de tout poil voudraient nous le faire croire et quelques gogos du net le renchérissent. Boulette, bavure, dérapage… ils n’ont plus de mots pour qualifier l’inqualifiable ; on croirait, à les entendre, que le Cardinal a fait une course-poursuite avec les carabinieri avec deux grammes dans le sang ! Et prendre le Cardinal Bertone pour un naïf, faut le faire !

Le Vatican et lui sont manifestement d’accord ; c’est une question de spécialistes et lui, le Cardinal, ne fait que les citer. Vous voyez une contradiction ? Pas moi. Libre à vous de hurler avec l’AFP, les gouvernements et les lobbies. Vous feriez mieux d’admirer le courage du Cardinal. J’ai même lu des fadas qui lui faisaient remettre en cause la position de l’Eglise sur l’homosexualité selon un raisonnement d’une probité intellectuelle simplement acrobatique : puisqu’il met une relation entre homosexualité et pédophilie, c’est qu’il justifie la seconde comme l’est déjà la première. Je préfère me taire…

Maintenant, on ferait mieux de chercher la fameuse relation, non dite, dont les experts et le Cardinal font état.

Disons tout d’abord et très clairement que cette question n’est absolument pas statistique, ni même morale. Elle est spirituelle, oui spirituelle, et c’est sous cet aspect seul que je l’aborde, comme prêtre, tout comme le cardinal Bertone, je suppose. Quand vous pensez aux homosexuels et aux pédophiles, vous pensez à leurs actes et à la qualification morale des actes commis. Là n’est absolument pas la question. Il s’agit de savoir comment on devient homosexuel, comment on peut sombrer dans la pédophilie (le vrai terme est pédérastie, que le langage marxiste a éradiqué, mais encore employé il y a 40 ans). On ne dit absolument pas que c’est pour les mêmes causes, indiquant par là que l’un est appelé à devenir l’autre. On dit, le cardinal et les experts disent, qu’il y a une relation, une parenté dans ces causes.

Cette relation-parenté est l’impuissance. Non pas l’impuissance physique, c’est évident malheureusement, mais l’impuissance considérée spirituellement, ou mieux dit, incapacité. Et la cause de cette impuissance spirituelle est l’éducation. Je m’explique.

Le pansexualisme de nos sociétés post soixante-huitarde a fait de la sexualité un produit de consommation beaucoup trop précoce où le désir précède la réalité jusqu’au grand écart. Le corps ne peut suivre la cadence effrénée imposée par l’éducation sexuelle et la mixité. L’homme, car il s’agit principalement de lui, n’a pas encore les ressources mentales de sa virilité, qu’on lui suggère, qu’on lui impose même, ses désirs les plus irréalisables. Mais les désirs sont là, violents et tyranniques, beaucoup trop tôt pour qu’ils puissent se réaliser dans l’ordre, amour et altérité. La conséquence inéluctable, et toujours spirituelle, c’est que le gamin va se contenter de « gibier » plus fragile, à sa mesure, à la taille de ses forces dérisoires. Cela prendra la forme d’un copain du même îge, aussi empêtré que lui dans des phantasmes inaccessibles, en passant par la petite sœur ou la cousine, insouciantes. Peu importe ici qu’on passe aux actes ou non. Comme mal de l’îme, il est fait et irréversiblement. La guerre va remplacer l’amour.

A cette cause primordiale s’en joint une autre, plus ancienne mais tout aussi dévastatrice. La mixité dans l’enfance et la première adolescence. Ce n’est un secret pour personne que les filles, de même îge que les garçons, ont deux à trois ans d’avance au mental, à l’assurance, au bagout, à la maîtrise de soi, à l’autorité. Dès lors, le garçon qui se met en chasse a beau fumer, cracher, dire des gros-mots, rouler des mécaniques et faire son macho : il est distancé, coiffé, toisé, baladé. Il a commencé trop tôt un exercice au dessus de ses forces et cette humiliation première va lui faire concevoir un mépris ridicule des femmes, une revanche à prendre sur elles… Ses désirs devront donc trouver des proies plus faciles et dignes de sa virilité en herbe ou avortée et non point ces sottes greluches arrogantes. Le péché commence (et finit) toujours dans l’esprit. Un jeune homme bien éduqué, au contraire, vous dira toujours que sa première tentative auprès d’une femme fut quasi héroïque…

La première femme de la vie d’un homme, c’est sa mère. Honnis soit qui mal y pense, c’est ainsi. Le dosage infini entre affection nécessaire et inéluctable émancipation n’est pas toujours atteint à ce point de perfection requise. Trop d’affectivité, ou pas assez, est également mortel et se trouve avoir des conséquences paradoxalement semblables et semblablement catastrophiques. L’un et l’autre ont ceci de commun qu’ils empêchent la maturité du petit d’homme ; qu’il devienne trop ou trop peu, les femmes lui seront inaccessibles ou insupportables. Et ce naturel-là ne reviendra jamais, ni au galop ni à pieds. Place à l’erzats.

Car la théorie du « gender » qui, n’en déplaise à ceux qui ne veulent pas seulement la considérer une minute, recèle quelque raison. Comment peut-on en arriver, pensez-vous, à nier le donné brutal de la différentiation sexuelle qui va pourtant jusqu’aux chromosomes de chacune de nos milliards de cellules ? C’est facile et contient une part essentielle de vérité. La différenciation sexuelle n’est pas seulement dans le corps par la nature mais bien autant et plus encore dans l’îme par l’éducation. La nature est là, sans doute, avec toute sa spécificité contraignante et irréversible. Mais entre la naissance qui la donne et la culture qui la sacre, il y a place à toutes les déviances. Sans quoi on en arriverait à ce singulier paradoxe : les matérialistes basant la différenciation sexuelle sur l’îme (la nature et le corps sont neutres) et nous la fondant sur le corps (la culture et l’îme seraient asexuées) ! Passé un délai, le sexe est bien plus marqué dans l’îme, invisible, que dans le corps, visible. Aristoteles dixerit.

Toute vérité comme toute erreur est spirituelle. Toute rectitude comme toute déviance aussi. Le Cardinal, pas plus que quiconque, n’affirme une causalité de l’homosexualité sur la pédophilie, l’une poussant à commettre les actes de l’autre. Le lui faire dire est imbécile. Il affirme une relation dans la cause de ces deux déviances, constatées par les experts, puis par lui. Les manifestations pourront en être diverses, heureusement, mais les causes ont un genre manifestement commun, en ce qu’il est spirituel. Et l’on comprend pourquoi ces pauvres îmes s’en prennent systématiquement à la société qui les a fabriqués de façon industrielle et systématique. Et odieusement injuste.

Il est urgent de stopper l’éducation sexuelle des enfants, la mixité scolaire, la pornographie sous toutes ces formes etc. Les vieux y perdent leurs îmes comme les jeunes y gîchent leurs vies.

Messages

  • Excellent !

    Démonstration magistrale. Et qui éclaire bien les comportements étranges de nos jeunes même lorsqu’ils ne sombrent pas dans la pédérastie au deux sens du terme (ancien et actuel).
    Les deux sexes effectivement se détestent et souvent en plus se méprisent, d’où le nombre de jeunes célibataires ou de couples qui n’en sont pas ou qu’à moitié, chacun gardant son porte-monnaie et son indépendance ! Toujours sur le qui-vive et prêt à déclarer forfait.

    Ayant enseigné dans un lycée de garçons de l’enseignement privé conventionné, le dernier qui restait m’a-t-on dit, j’ai été stupéfaite de sa haute tenue, de la courtoisie des jeunes et de la décontraction des professeurs en complet contraste avec les autres écoles privées mixtes où j’ai aussi enseigné. Dans ces dernières, les professeurs étaient sans cesse sur le qui-vive, inquiets, déboussolés et inutile de parler du mental des pauvres élèves !

    Oui, j’ai vraiment relevé ce que vous expliquez fort bien et j’ai même fait part (non de l’explication mais du constat) à qui voulait bien m’entendre... Malheureusement apparemment personne n’a voulu m’entendre !

    Merci Monsieur l’Abbé ! Je conserve votre explication lumineuse et je vais la faire partager !

    Gentiloup

  • Cher abbé,

    Tout d’abord merci pour votre texte. Comme tout texte de qualité il appelle un certain nombre de questions et de remarques.

    En quoi la relation entre homosexualité et pédérastie est-elle spirituelle et non morale ou statistique ? Que l’on décide de s’intéresser au phénomène en mettant de côté tout a priori moral se comprend mais on ne peut faire fi de la régularité statistique qui, en tant que donnée de base, nous permet de nous interroger sur la relation en question. De plus pourriez-vous, s’il vous plaît, définir le spirituel ? (comme vous le disiez il y a fort longtemps lors d’un débat avec le Père de la Morandais, un certain usage des mots les a vidés de leurs sens ; j’en suis une malheureuse victime et vous serais reconnaissant si vous pouviez m’éclairer un peu)

    J’approuve tout à fait vos propos concernant l’éducation sexuelle et les désirs qu’elle crée chez les plus jeunes. Comme le dit le Père Tony Anatrella, les « éducateurs  » ne prennent pas en compte les enseignements de base de la psychologie, et oublient donc de s’adapter à leur public, ce qui montre, selon lui, que cette éducation, sous prétexte de prévention, n’est qu’une sorte d’exhibitionnisme, les adultes exposant leurs perversions sexuelles aux enfants.

    Je suis d’accord avec ce que vous dites au sujet de la mixité scolaire. Elle ne prend pas en compte les rythmes de développement propre à chaque sexe. Cependant, ce dont vous parlez semble plutôt allez du côté d’une genèse de la misogynie que de l’homosexualité. Je ne suis pas sûr que celle-ci résulte de l’échec d’une confrontation avec les femmes. Je pense (mais ce n’est qu’une hypothèse) que l’on a affaire à quelque chose de plus profond, à une peur ou à un refus a priori de toute relation avec les femmes qui excède l’amitié (on ne pourrait donc pas parler d’ersatz puisqu’il n’y aurait pas d’échec premier ; je tiens à vous faire remarquer que vous ne parlez que de l’homosexualité masculine, or je ne pense pas que la thèse de l’échec-repli fonctionne bien dans le cas de l’homosexualité féminine). L’homosexualité a trait au fait que l’individu n’est pas capable d’érotiser sa relation à l’autre sexe. L’autre n’est, finalement, pas désirable, contrairement à moi-même (ou à tout ce qui est proche de ce que je suis). Il faut donc aller chercher du côté du narcissisme, du sentiment d’autosuffisance et du refus de l’altérité qu’ils entraînent (ce qui n’est pas sans conséquence du point de vue moral, religieux, politique, etc.). Quant à savoir d’où vient le narcissisme, je crois que Christopher Lasch en a parlé dans un de ses ouvrages.

    Je trouve intéressant que vous citiez les gender studies. Par contre je ne comprends pas pourquoi vous en parlez ici. La théorie du genre s’en prend au genre (homme-femme) voire au sexe biologique mais distingue clairement ceux-ci et l’orientation sexuelle, si bien que je vois mal comment vous l’introduisez par rapport à votre problématique (l’approche la plus pertinente serait de souligner les risques que comporte la négation de la différence des sexes pour la constitution de l’identité des individus et de ses conséquences sur les pratiques sexuelles, lesquels ne sauraient être matures dans la mesure où la maturité suppose que l’on a trouvé sa position par rapport à l’autre (et non par rapport à soi-même : on retombe sur le narcissisme)). Toutefois, le paradoxe sur lequel vous mettez le doigt est très intéressant. Pour ma part, ce n’est pas la première fois que je me pose la question du matérialisme de certains catholiques. En matière d’enfants, par exemple : Saint Augustin dit quelque part que tant que le Christ n’était pas né il était normal d’avoir des enfants, mais maintenant qu’il est venu, il n’est en soi pas nécessaire d’en avoir, or, nombre de catholiques me semblent excessivement attachés à la fécondité (ce qui ne veut pas dire que je sois favorable aux méthodes de contraception non naturelles). Cependant, je ne saurais dire d’où vient ce matérialisme.

    Je m’excuse pour cette réponse excessivement longue. J’espère que vos occupations vous laisseront le temps de me répondre.

    Alexis

    • Cher Alexis,

      La qualité de votre texte mérite une publication immédiate, qui honnore ce forum. Merci. Je n’ai vraiment pas le temps d’y répondre en ce moment, vraiment. Ceci n’est en rien une dérrobade, au contraire.

      Simplement ceci, pour faire court. Le spirituel, au seul niveau duquel j’ai voulu me situer, et comme je vous remercie de l’avoir compris, c’est l’âme, brute au départ. L’intellect, dirait Aristote, ce miracle de l’homme. Par son dévelopement spirituel, mais comme forme du corps, l’âme se charge de mille choses. La grâce (ou pas) les habitus surnaturels ou acquis, qui façonnent les passions, le corps lui-même. On a la tête qu’on mérite, passée la cinquentaine... Tout cela est spirituel, exclusivement spirituel. Notre sexualité n’échappe pas à cette universelle emprise de l’esprit sur le corps. Et l’esprit peut respecter le corps ou le renier... Il faut choisir. Et c’est malheureusement les adultes qui choisissent pour les jeunes !

  • Monsieur l’abbé,

    je précise que je fais partie, selon l’expression utilisée par l’Eglise, des "hommes de bonne volonté", même si comme nombre de mes compatriotes j’ai été baptisé et ai reçu un minimum d’éducation religieuse.

    Je voulais d’abord vous féliciter pour la qualité de votre argumentation. J’allais dire pour le fait que vous argumentiez tout simplement. Peut-être que Mgr Bertone et le Pape lui-même seraient davantage compris s’ils ne se contentaient pas de formules lapidaires dont les médias se gargarisent mais sans jamais les décortiquer ni susciter de vrais débats de fond à leur sujet.

    Je voulais cependant faire part de quelques remarques et vous poser quelques questions.

    Vous écrivez qu’il faut "stopper l’éducation sexuelle des enfants, la mixité scolaire, la pornographie sous toutes ces formes". Pourtant, un argument fréquemment utilisé pour expliquer la pédophilie (en particulier chez certains prêtres) est justement que l’absence de mixité et d’éducation sexuelles "fabrique" des hommes immatures, ce qui les conduit à devenir des pervers.

    je suis d’accord avec vous sur les dégâts de la pornographie "sous toutes ses formes" mais est-il judicieux d’empêcher les enfants de cotoyer d’autres enfants du sexe opposé, est-il judicieux de faire de la sexualité un tabou absolu ? La parole et l’échange, à condition naturellement de choisir ses mots, ses métaphores et d’adapter son discours à son public, ne sont-elles pas au contraire à la base de toute éducation ? combien d’enfants évoluent mal, une fois adultes, justement parce qu’ils n’ont pas eu ces échanges avec leurs parents ? du reste, le Christ ne nous enseigne -t-il pas que la parole libère ?

    D’autres part, l’hypothèse d’une origine génétique de l’homosexualité et de la pédophilie est sérieuse. Si elle est retenue, cela change tout, en tous cas cela évacue les causes spirituelles que vous évoquez.

    Enfin, que faire des personnes homosexuelles ? est-il judicieux de les condamner à l’abstinence (alors que le plus souvent elles ne peuvent rien contre leur état) au risque d’en faire des êtres frustrés, avec toutes les conséquences néfastes que cela peut avoir ?

    Merci d’avoir pris le temps de lire ce message. Nous n’évoluons sans doute pas dans le même univers, mais je veux croire que le dialogue est toujours fécond.

    Cordialement

    • Sauf pour les deux dernières, les réponses à votre texte sont dans le mien ! Mon allusion à la théorie du"gender" (je suis radicalement contre, bien sûr) ne concerne en rien le donné naturel, mais évidemment l’éducation conforme à ce donné, supposé clair. On ne nait pas homosexuel, on le devient, justement parce que l’éducation n’a pas respecté la conformité au naturel. La nature est sexuée, l’éducation peut ne l’être pas, hélas.

      Quant aux homoxesuels existants, nul ne peut les juger au for interne : ils sont plus des victimes que des coupables. Ce n’est pas une raison pour admettre leur déviance, surtout qu’à lire le précédent on comprend, quoiqu’on aît pu en dire, qu’ils se reproduisent par semblable éducation. Seule la grâce de Dieu peut transcender cet état, comme d’ailleurs toute autre infirmité. Le scandale évité, ils ont sûrement une belle place dans le Royaume des cieux !

  • Les médias français ont rétabli la censure : les catholiques sincères ne diront et n’écriront plus rien qui ne soit déformé puis bruyamment condamné.

    Ce faisant, ces médias vous construisent tout de même une notoriété, certes peu enviable aujourd’hui, mais qui, si vous conservez une attitude digne et cohérente, produira demain un effet opposé à celui qu’ils attendent.

    Ils faut donc être patients ; le temps a travaillé contre eux ; il continue de le faire et c’est pour cela qu’ils s’énervent.

  • Monsieur l’Abbé,

    Ayant grandi dans un famille catholique que d’aucuns qualifieraient de post-concilaire, et ayant eu des discussions avec des membres de la FSSPX qui m’ont toujours un peu horrifié (comment la foi catholique peut-elle à ce point être vecteur d’exclusion ? Comment la charité ne peut-elle être en fait que condescendance ? Comment en arriver à être effrayé par un Dieu punisseur alors qu’il y a 2000 ans son fils est venu nous révéler qu’il était amour ? Entre autres questions, qui ne sont pas le débat ici...), j’ai développé un rejet quasi épidermique de tout discours provenant de ces gens-là, dont vous fîtes je crois partie. Mais je dois reconnaître que le texte que vous publiez sur la très douloureuse question de la pédophilie m’a intrigué. Je me permettrai donc quelques remarques, qui peuvent en fait - mais il faudrait en discuter plus longuement - être complémentaires de votre analyse. Peut-être.

    Tout d’abord, vous ne l’écrivez pas donc je ne sais pas ce que vous en pensez, mais il me semble que justement d’un point de vue moral et en termes de corruption de l’âme, l’homosexualité et la pédophilie de sauraient être placées au même niveau. Dans le premier cas on parle de relations impliquant deux personnes consentantes, dans le second d’une attaque envers une personne faible, innocente, et non consentante. L’homosexualité ne va pas contre le libre arbitre et la conscience d’autrui, ou en tout cas beaucoup beaucoup plus indirectement que la pédophilie. Il y a donc une gradation du péché (si tant est que l’homosexualité en soit un dans l’absolu) entre ces deux ... choses.

    De plus vous ne parlez pas de l’aspect statistique. Or je pense qu’il doit être mentionné car il est plus "objectif" - imaginez que vous vous adressez à un incroyant - que l’aspect spirituel. Et les statistiques sont là : la première institution dans laquelle des faits de pédophilie sont constatées et la famille, fruit par définition d’une union hétérosexuelle. Un père, un grand-père, un oncle, un grand frère, voire même parfois une parente, vont s’en prendre à un enfant. S’agissant de ce dernier, je ne connais pas les statistiques, mais j’aurais tendance à penser que les garçons ne sont pas forcément les plus nombreux. Mais ce qui importe dans le sujet qui nous intéresse, ce sont les coupables. Or une famille étant fondée sur une relation hétérosexuelle, on peut a priori considérer que le père ou le grand-père n’est pas homosexuel. Les faits de pédophilie là où ils sont les plus nombreux (la famille) ne sont donc pas le forfait de personnes homosexuelles. A moins que... mais j’y reviendrai peut-être plus bas.

    Dans l’Eglise catholique, les faits sont commis par des hommes célibataires, et visent plus souvents de adolescents (donc de jeunes garçons) que des enfants à proprement parler. Le terme de pédophilie répond à une approche légal (relationa vec mineur de moins de 15 ans), mais il s’agirait plutôt, pour ce qu j’en sais, d’éphébophilie. Mais le plus important ici est que contrairement à la famille, les faits commis par des prêtres semblent bel et bien être des faits commis par des prêtres homosexuels (il y en a, comme vous le savez).

    Ainsi nous avons une institution (la famille) dans lesquels des faits sont commis par des personnes dont on peut supposer qu’elles ne sont pas homosexuelles, et une autre (l’Eglise) dans lesquels des faits le sont par des personnes dont on peut penser qu’elles sont homosexuelles. La question se pose donc de savoir pourquoi dans un cas comme dans l’autre, les faits, d’égale gravité, diffèrent dans leur manifestation.

    La particularité de l’Eglise (même post-conciliaire, ce qui devrait vous rassurer) est de n’offrir qu’un accueil extrêmement lacunaire aux personnes homosexuelles. Le seul chemin qui leur soit proposé est celui de l’abstinence totale, à partir de textes bibliques ayant fait l’objet dans la Tradition d’une interprétation rigoriste pertinente ou pas - là n’est pas la question. Et même en dehors du clergé, dans les familles catholiques, l’homosexualité reste très mal acceptée. Donc les personnes concernées évoluant dans ce milieu n’ont, si elles sont fragiles, pas d’autre solution que de le cacher. Et comment le cacher sans s’engager dans un mariage voué à l’échec si ce n’est dans la prêtrise ? L’Eglise accueille donc, sans le vouloir, un certain nombre de ce qu’il est convenu d’appeler des homoseuels refoulés.

    Vous me direz, cela pouvait très bien être vrai avant et de tels faits n’étaient pas constatés. Certes. Mais il y a encore quelques décennies, les prêtres étaient beaucoup mieux intégrés dans le tissu social qu’ils ne le sont aujourd’hui. Les prêtres actuels, notamment dans les petites villes et les villages, sont des personnes très seules. Ils ne sont plus invités chez leur paroissien, reçoivent très peu de visites, et n’ont de contact avec les fidèles qu’à la messe du dimanche. Ca ne changera pas. Ces prêtres, pour certains homosexuels refoulés (c’est arrivé dans ma paroisse...) se retrouvent donc très seuls face à cette souffrance dont ils n’osent parler à personnes. Et certains, peut-être plus fragiles mais tout aussi responsables, sombrent dans la pédophilie.

    Là où ces remarques peuvent être complémentaires avec les vôtres, monsieur l’Abbé, c’est qu’elles tissent un lien entre pédophilie et homosexualité, en un sens. Donc si l’homosexualité est une cause de la pédophilie, la cause de l’homosexualité en est logiquement une de la pédophilie.

    Mais le point central sur lequel je voudrais insister et pour lequel je pars du constat d’une différence de modalité entre les faits dans les familles et les faits dans l’Eglise (différence entre ceux qui les commettent), c’est que si lien il y a, ce n’est pas entre la pédophilie et l’homosexualité en tant que telle, mais entre la pédophilie et l’homosexualité mal acceptée, mal accueillie, refoulée et vécue seul. Le père de famille pédophile est peut-être lui aussi homosexuel, tout comme le grand-père qui attaquerait son petit fils. Mais l’un comme l’autre sont de fait engagés dans une relation hétérosexuelle : dans cette configuration ils sont eux aussi des "homosexuels refoulés.

    Ce n’est pas en attaquant l’homosexualité et les homosexuels que se résoudra le problème de la pédophilie, encore plus terrible quand il implique des prêtres. C’est au contraire en l’accueillant mieux. Le refoulement, la frustration, ne peuvent pas pour tout le monde être combattus et contenus toute une vie. Si je n’ose prôner ici des vertus à l’homosexualité (je suis convaincu qu’elle en a, mais ce n’est pas le sujet), je pense que l’on peut au moins envisager d’accueillir les personnes homosexuelles. Les accueillir vraiment. Pas avec condescendance et mépris. Alors les personnes concernées le diront, en parleront, et ne seront pas soumis à une torture psychologique qui génère, qui génère j’insiste, des actions misérables.

    En union de prière je ne sais pas, mais en tout cas bien cordialement,

    Un catholique

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