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"Voici. Nous montons à Jérusalem".

Chers amis, pour vous faire rentrer en carême...

lundi 7 mars 2022, par Abbé Philippe Laguérie

Voici revenu le temps du Carême et avec lui nos protestations de fidélité du genre « Vous allez voir ce que vous allez voir ». Je vais faire ceci, cela, et encore ceci et même ça. Les femmes se proposent de perdre en 40 jours les 12 kilos de trop qu’elles trimbalent depuis...10 ans. Les hommes décident d’arrêter l’alcool ou les cigarettes, pire les deux, et inaugurent, non point un carême pour eux, mais un calvaire pour leur entourage. Ce genre de carême, si mal fagocité ab initio, s’effondre sur lui-même en quelques jours… Et madame de supplier monsieur de reprendre ses (mauvaises) habitudes et monsieur de convaincre madame qu’il la préfère assurément en quelque gracieuse rondeur…

La pénitence, il faut vous le rappeler, est une vertu ; c’est à dire une disposition habituelle de l’âme, toute spirituelle donc et, pour nous chrétiens, surnaturelle. C’est donc bien par là qu’il faut commencer, persévérer et finir. Non pas que cette disposition ne se traduise par des actes concrets que l’on regroupe sous le terme (pas très médiatique, j’en conviens) de renoncement. Mais justement si rien ne change ce n’est pas tant la mollesse en ceux-ci que le défaut en celle-là.

Le chrétien se sait pécheur, faible, né poussière et tout prêt de la rejoindre. Les années qui passent n’arrangent que rarement la chose. Les vieux sont généralement bien plus tordus et méchants que les jeunes, comme en témoigne le récit de la chaste Suzanne (Cf. Daniel) et le récit de la femme adultère : on s’y retire les uns après les autres « A commencer par les plus vieux » ! David conjure son Dieu : « lorsque ma force se délitera, Seigneur, ne m’abandonnez pas ».

Mais ce qui n’est pas inexorable (« chaque jour vers l’enfer nous descendons d’un pas » (Cf Baudelaire) c’est notre esprit. Pour être faible lui aussi, il n’en est pas moins prompt. Capable de retournements spectaculaires, de décisions sérieuses, de changement durables et profonds. Toujours David : « Et j’ai dit : maintenant je commence ! ». « Ma jeunesse sera renouvelée comme l’aigle ». La pénitence commence dans, par, avec l’esprit, le nôtre et plus encore celui de Dieu.

C’est donc par là, par une vraie conversion, qu’il faut entreprendre son carême. Il nous faut faire demi-tour. Nous étions dans la mauvaise direction, oui mais l’Esprit Saint, notre infaillible GPS nous crie : « Faites demi-tour dès que possible ». Ce changement de sens de circulation est explicitement dans l’Evangile. Un homme, tout homme, nous les hommes nous descendons de Jérusalem à Jericho et nous sommes à la merci des brigands, spoliés, blessés, à demi-morts. Jésus-lui entreprend, avec nous, son ascension vers Jérusalem. Même demi-tour spectaculaire chez le terrible et insensé fils-prodigue. Il part dans un pays lointain, plaque un père délicieux et s’en va dissiper tous ses biens avec les péripatéticiennes… Beau travail ! Mais bien plus spectaculaire est son demi-tour-retour. « Oui, je me lèverai ! Oui, j’irai vers mon père ! » Et de reprendre le chemin du salut. Sans doute mu par la faim au départ et pour quitter la vie infernale que nous fait mener le péché. Mais il considère surtout le souvenir de la bonté de ce père. Il prépare ses phrases maladroites que d’ailleurs il n’aura pas le temps d’achever, le moment venu. « Mon père, j’ai péché contre le Ciel et contre toi, je ne suis pas digne d’être appelé ton fils... ». Il prévoyait d’ajouter : « traite-moi comme l’un de tes serviteurs ». Pas le temps d’achever : le père lui coupe la parole et donne ses ordres ; vite une belle robe, vite son anneau de fils, vite un veau bien gras. Musiques, festin, vins et danses…toute la nuit.

Alors rangez-moi vos carêmes sportifs, compétitifs et olympiques. Ils sont voués à l’échec. Convertissez-vous et mettez-vous en route vers Jérusalem. Chemin faisant vous n’êtes pas seuls. Vous montez avec Jésus, le premier de cordée, splendide et triomphant au final. Le sacrement de pénitence lui-même serait invalide sans cette vertu de pénitence et si faisait défaut cet « inchoatio amoris » qu’y exige le concile de Trente. Le pécheur fuit sans cesse les craintes de ce monde. Le juste est tiré en avant par son amour. Esclave ou fils, il faut choisir.

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