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Question morale assez urgente

lundi 17 décembre 2007, par Le secrétaire

Bonjour Monsieur l’abbé,

Merci pour ce blog.

J’ai plusieurs questions à poser. Je suis chrétien, catholique et de simples références des documents du magistère ou du droit canon ou des saintes écritures suffiraient peut être à répondre si vous êtes débordé par ailleurs.

Une femme peut-elle moralement quitter son mari craignant de nouvelles violences de la part de ce dernier sur leur enfant.( Violence sans risque de blessure physique grave) ?

Une femme qui attend un enfant peut elle moralement abandonner ce dernier à la naissance si son mari (qui est père de l’enfant) menace de partir si elle ne le fait pas ?

Merci

Bien à vous

Frank Lecerf

Question morale assez urgente

17 décembre 2007 10:59, par Abbé Philippe Laguérie

Cher monsieur,

Il va sans dire que, dans l’une et l’autre de vos questions, nous parlerons uniquement de la séparation de corps (de domicile, de vie) et jamais du divorce. Ce dernier est la supposée rupture du lien, que l’Eglise ne permet jamais dès lors qu’il est établi ; par la raison très simple qu’Elle n’en a pas le pouvoir. L’Eglise peut prononcer par ses tribunaux l’inexistence d’un lien (sacramentel) mais si lien il y a, Elle ne peut jamais le rompre. Et encore moins les fidèles de leur propre initiative. Là s’appliquent les paroles fortes de saint Augustin : « si le mariage est de Dieu, le divorce est du diable ».

Mais l’Eglise peut permettre, pour des raisons très graves, la séparation des époux (qui le restent donc). Aujourd’hui encore les évêques se réservent cette permission et le prêtre auquel un fidèle le demande doit en référer à l’évêché (Canon 1692). L’évêque peut permettre cette séparation par simple décret, (voie administrative) tandis que son officialité, son tribunal, le fera par sentence (voie judiciaire). On notera donc que des prêtres qui se permettent de donner seuls une telle autorisation de séparation, outrepassent largement et gravement leurs prérogatives.

La séparation définitive n’est autorisée qu’en cas d’adultère (canon1152). La raison en est que seul l’adultère (non pardonné) dispense la partie trahie du devoir conjugal. Lequel ne trouve jamais son compte dans une séparation…

Ce qui veut dire que toutes les autres séparations sont temporaires, de soi. Elles doivent cesser quand cesse la cause qui les autorise.

Parmi les raisons graves qui autorisent la séparation temporaire, il y a évidemment la violence physique sur l’épouse ou sur les enfants (canon 1153). Le même canon reconnaît aussi qu’un grave préjudice spirituel (corruption morale grave, par exemple) permet aussi cette séparation. Il est précisé que l’on peut, en cas de danger grave et imminent, se séparer immédiatement de sa propre initiative et ne recourir à l’Autorité qu’après. C’est le bon sens.

Ainsi est résolue votre première question : cette malheureuse femme peut se séparer d’elle-même en cas de danger grave et imminent et devra recourir à l’évêque ensuite (par l’intermédiaire d’un prêtre, généralement). Une telle séparation devrait cesser dès lors que le délinquant est revenu de son inconduite. Si tel n’est pas le cas (le plus souvent, hélas) cette séparation durera d’autant, (de fait) sans pour autant devenir définitive (de droit).

Mais votre seconde question n’a rien à voir ! Il n’y a aucun cas moral pour qu’une mère (ou un père) abandonne son enfant. C’est le droit naturel qui l’exige et il ne connaît pas d’exception. Le canon 1154 précise que ce grave devoir à l’égard des enfants perdure toujours dans la séparation légitime : a fortiori en dehors d’elle. Le chantage odieux du « toi ou lui » devra être méprisé et si ce cas dégénère, on laissera partir ce père indigne, sans évidemment rien faire pour le chasser.

Notons enfin, pour rassurer bon nombre de scrupuleux qui pourraient lire ces lignes, qu’une femme ou un homme abandonné de fait par son conjoint, n’en n’est pas coupable et n’a pas à faire de démarche. Elle, ou il, doit simplement se demander ce qui, dans sa conduite, a pu induire celle de l’autre. Les cas précédents ne visent que ceux qui prennent l’initiative de la séparation.

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